Au « pacte de responsabilité » annoncé lors de ses vœux par François
Hollande, André Chassaigne, député PCF du Puy-de-Dôme et président du
groupe GDR (Gauche démocrate et républicaine) à l’Assemblée nationale,
oppose un « pacte de solidarité » appuyé sur une hausse des salaires,
une modulation des impôts des entreprises et des investissements
publics.
L’année 2014 s’ouvre sur
l’officialisation du tournant libéral de la majorité présidentielle. La
déclaration de guerre à la finance et aux excès du marché s’est perdue
dans les archives électorales du Parti socialiste. Avec cynisme et sans
vergogne, le mal nommé « pacte de responsabilité » fait appel aux forces
économiques et financières pour sortir le pays d’une crise dont elles
sont les premières responsables…
Derrière l’initiative présidentielle, il y a un programme patronal que
le chef de l’État s’est engagé à mettre en œuvre ; une décision
historique symbolisant à elle seule un mouvement plus global : la
droitisation de la social-démocratie en Europe, Schröder et Tony Blair
s’étant imposés comme des références en la matière. Cette tendance
lourde s’inscrit elle-même dans la continuité de la soumission du
pouvoir politique aux forces économiques et financières, le premier
étant réduit à la fonction d’exécutant des secondes.
Malgré sa tradition républicaine et son sens de l’intérêt général, la
France n’échappe pas à cette dérive des démocraties modernes. Le « pacte
de responsabilité » ou « de confiance », selon la terminologie de
l’Élysée ou du Medef, n’est rien d’autre qu’un pacte de co-gestion du
pays sur la base d’un programme commun animé par les préceptes libéraux !
Un plan d’action, dont la lettre et l’esprit sont directement inspirés
par Pierre Gattaz, le patron du Medef, lequel a reconnu, sans être
contredit, qu’il avait apporté le pacte de responsabilité « sur un
plateau » au Président de la République. L’organisation patronale
s’affirme ainsi comme la principale source d’influence de la politique
nationale menée par une majorité au pouvoir qui s’éloigne des valeurs de
solidarité et de justice sociale propres à la gauche. Dès lors, peut-on
encore considérer que « la gauche est au pouvoir » ? Le doute est, plus
que jamais, permis…
Le principe des concessions réciproques ou du « donnant-donnant » (moins
de charges contre plus d’embauches) n’est pas novateur. La méthode
connaît des précédents calamiteux. Il suffit ici de rappeler le bilan
peu convaincant du fameux « contrat d’avenir de la restauration » : la
profession s’était engagée à créer 40 000 emplois supplémentaires en
deux ans en échange d’une baisse du taux de TVA de 19,6 % à 5,5 % au 1er
juillet 2009 … Aujourd’hui, le Medef se félicite de la baisse massive
annoncée des prélèvements sur les entreprises, suivant un processus
d’allègement des charges engagé en novembre 2012 avec le Crédit d’impôt
compétitivité emploi (CICE) et qui se poursuivra avec la suppression des
cotisations familiales pour les entreprises. Il refuse, en revanche, de
s’engager formellement sur la création d’emplois. Signe du caractère
déséquilibré et irréaliste de ce pacte.
Les grands chantiers annoncés confirment la voie non pas
social-démocrate mais purement libérale dans laquelle s’enfonce notre
pays. Au nom de l’austérité budgétaire et de l’aide au patronat, nos
concitoyens subiront une nouvelle baisse de 50 milliards d’euros des
dépenses publiques qui se traduira par la réduction des dépenses de
santé et l’asphyxie des collectivités territoriales (or, près d’un quart
du pouvoir d’achat des ménages résulte de la prise en charge publique
des frais de santé, d’éducation, de logement et de transport). A
l’inverse, « dégagées » de toute responsabilité sociale, les entreprises
bénéficieront d’un allégement des prélèvements, dont une baisse de 30
milliards d’euros des cotisations familiales. L’obsession de la baisse
du coût du travail fait office de dogme pour la majorité au pouvoir.
Faute de s’attaquer aux rémunérations excessives et spéculatives de la
finance et du capital, l’Élysée voit dans le coût du travail un ennemi
bien identifié !
Nous ne sommes pas enclins à laisser faire, à laisser la majorité au
pouvoir céder aux sirènes du libéralisme. Des solutions dignes des
valeurs de gauche existent. Ayons le courage politique de mettre en
œuvre un « pacte de solidarité » à la hauteur des attentes de nos
concitoyens. Face à l’austérité budgétaire, l’abandon de nos services
publics et l’« irresponsabilité sociale » de certaines entreprises, nous
rappelons l’urgence d’un tournant… mais un tournant à gauche ! Ce
tournant suppose la modulation de l’imposition et des cotisations des
entreprises, à savoir moins d’impôts pour les entreprises qui
investissent et créent de l’emploi, et plus d’impôts pour celles qui
versent de juteux dividendes à leurs actionnaires. Ce tournant est
synonyme d’augmentation des salaires et des pensions pour soutenir la
demande intérieure, dans l’intérêt bien compris de tous, y compris des
entreprises. Un tournant où l’abaissement du coût du capital, qui pèse
sur notre économie et pénalise l’investissement, est un postulat. Un
tournant qui privilégie l’investissement public, moteur de croissance,
de création de richesses et d’emplois.
La sortie de crise ne saurait, enfin, être conçue en dehors d’une
impulsion européenne en faveur d’une Europe sociale. Après avoir dénoncé
la ratification du traité d’austérité, nous portons l’idée d’un «
Traité social » porteur de valeurs et de normes protectrices de nos
travailleurs, socle d’une Europe solidaire libérée de la tutelle des
marchés financiers, des dogmes du libéralisme et de l’orthodoxie
budgétaire.
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