4.De la collecte
des déchets à leur stockage puis à leur traitement, les marchés publics ont
donné -et donnent- lieu à d'innombrables contestations voire plus...Tout le Var
est concerné
Depuis plus de 20 ans que la
privatisation, un peu partout en France, des services d'enlèvement des ordures
ménagères est devenue la règle tant le marché des ordures est juteux, Toulon
s'est distinguée.
Sans refaire l'histoire,
l'épisode de la période FN, de 1995 à 2001 a atteint des sommets avec des
décisions municipales aussitôt contestées par le préfet. Avec une amende de près de 9 millions d'euros à payer
à l'ancien délégataire ! Le rapport de la Chambre régionale des comptes
d'avril 2007 (1.) portant sur 1995-2005 est très détaillé sur le sujet.
Après, c'est-à-dire de 2001 à
2013, Toulon a privilégié les géants du secteur, finis les Barla, Bronzo
(filiale de la SEM aspirée depuis par Veolia), Onyx devenue en 2005 Véolia
propreté. Vinci pour le tunnel et des travaux de réparation à Amphitria et
maintenant Pizzorno pour la collecte des ordures à Toulon (parmi des dizaines
d'autres communes) et la gestion de l'incinérateur de Lagoubran qui fait couler
beaucoup d'encre. (Veolia a également été choisi par DCNS pour la collecte des
hydrocarbures et des déchets industriels sur le Charles De Gaulle).
Un job qui rapporte
Ou plutôt une véritable industrie
entre les mains de grands groupes à dimension
internationale. Même Pizzorno, un local désormais coté en bourse, est implanté
à l'étranger, ce qui n'est pas une tare. Ce qui l'est davantage c'est que le
recours au privé ne fait pas baisser les coûts de la taxe d'enlèvement des
ordures ménagères (TEOM) -qui représente près de 6 milliards d'euros en 2013-,
ni du stockage, ni du traitement. Et n'améliore pas la qualité du service rendu
à la hauteur de l'évolution de la dite taxe.
Au point de se demander comment
il se fait que les délégataires patentés ici et ailleurs, puissent éliminer
aussi facilement la concurrence ? Question de régularité de la passation
des marchés que se posent régulièrement la Cour des Comptes, le Conseil de la
concurrence...et les contribuables.
Dans son étude d'octobre 2011,
« Que choisir » indiquait qu'en 20 ans la TEOM avait
quadruplé, passant de 1,28 milliards en 1990 à 5,4 milliards d'euros alors que
le volume de déchets est en très faible augmentation. En 1995, une autre taxe
est venue s'ajouter, la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) pour
financer le stockage et la valorisation (incinération, recyclage) des déchets
de manière à en finir avec les décharges sauvages ou celles mettant en cause
l'environnement, comme celle du Balençan au Cannet-des-Maures gérée
par...Pizzorno faisant l'objet de contentieux à répétition pour non-respect des
réglementations dans un espace particulièrement sensible.
Mais cela ne justifie pas une
telle évolution de la TEOM selon les auteurs de l'enquête qui déplorent le
manque de transparence financière et l'opacité des rapports.. lorsqu'ils sont
fournis
Le tableau en fin de page indique
pour les collectivités ou EPCI (Etablissement public de coopération
intercommunale) de plus de 300 000 habitants l’écart entre le coût réel et le
coût de référence calculé pour un schéma d’organisation comparable.
On constate ainsi qu’à Marseille,
Biarritz ou Saint Nazaire, les coûts affichés sont nettement supérieurs à ce
qu’on observe sur l’ensemble du territoire pour une qualité de service similaire
(gisements, modalités de collecte et de traitement).
Marseille affiche des coûts de
gestion à la tonne supérieurs de plus de 50 euros à son référentiel de coûts.
En outre, la ville enregistre une masse de déchets par habitant
particulièrement élevée (660 Kg/hab), soit une fois et demie les gisements de
villes comme Lyon ou Strasbourg.
TPM ne figure pas dans ce tableau. On peut
penser qu'à l'époque l'agglo n'avait pas dû communiquer les chiffres demandés.
Le maire de La Seyne confirme,
tout récemment sur son blog : « le coût de la tonne d'ordures
incinérée a augmenté de 25% en 5 ans ! » S'il n'envisage pas dans
l'immédiat la remunicipalisation du service d'enlèvement des déchets, c'est que
la situation financière de la ville ne le lui permet pas, dit-il. La droite a
laissé un endettement colossal qui remonte, pour partie, à la liquidation
industrielle qui avait commencé par les mines, la sidérurgie et les chantiers
navals, dans les années 1980.
Ce qui plombe les investissements
ajouté aux transferts de charges de l'Etat sur les collectivités territoriales
et à l'austérité qui ne fait qu'accentuer la perte de ressources pour les
communes et de pouvoir d'achat pour les habitants.
Le marché de
l'incinérateur : Pizzorno sur la sellette
Avant, revenons sur la décharge
du Balençan qui reçoit les déchets (200 000 tonnes/an) d'une centaine de
communes et qui fait l'objet de contentieux depuis plus de 20 ans. Elle ne
devrait plus être en activité depuis le 20 avril 2013 par décision de
justice ! Pizzorno n'en a cure et continue d'aménager le site au grand dam
du maire et des organisations de protection de l'environnement. « Ils
font des aménagements en avance et après l'Etat régularise, c'est comme ça
depuis 40 ans. » constate amèrement le maire du Cannet-des-Maures.
Côté préfecture, les préfets se
succèdent tous les deux-trois ans et ne font rien, comme si Pizzorno se sentait
intouchable. D'autant qu'il faut trouver une solution de rechange et qu'elle
n'a jamais été mise à l'ordre du jour. Les amis politiques de Pizzorno, à la
tête du département comme de nombreuses communes, sont les premiers
responsables de cette situation.
Présent fin novembre à
l'assemblée des maires ruraux, Laurent Cayrel, l'actuel préfet du Var a dû
reconnaître « qu'il y avait le feu à la maison et qu'il va falloir statuer... » en attendant de
passer la patate chaude à son successeur !
Il n'ignore pas qu'entre temps,
Pizzorno a rafflé le marché de la collecte à Toulon et du traitement pour
l'aire toulonnaise et que Falco est un appui politique de poids. Mais quelques
nuages s'amoncellent sur le dernier dossier de l'incinérateur de
Lagoubran : le choix de Pizzorno.
Si l'on en croit Médiapart (2) du
10 octobre 2013, une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de
Toulon sur les conditions d'attribution de ce marché de 470 millions sur 18
ans, entachées de soupçon de favoritisme. Au printemps ce dossier a été
transféré au pôle financier spécialisé de Marseille.
Médiapart a été informé par la
filiale de Suez-Environnement qui a déposé un recours devant le tribunal
administratif. L'autre perdant n'était autre que Véolia, deux très grosses
pointures qui n'ont pas eu la confiance du SITTOMAT, syndicat intercommunal de
26 communes qui gère le site et délègue la partie technique à des entreprises
privées compétentes, théoriquement mises en concurrence...loyale.
Pizzorno n'était pas connu pour
son expérience d'exploitant d'incinérateur, il avait associé une société Idex
pour cela. Il jure avoir respecté les
règles de la procédure tandis que le SITTOMAT n'était pas au courant de
l'enquête, il avait fait son choix après consultation d'un bureau d'études.
Son président, l'adjoint UMP Guy
Di Giorgio, avait donné, 15 jours avant la décision du SITTOMAT, un avis de
conclure en faveur de Pizzorno qui devait être suivi le 30 novembre 2012.
Ce qu'a confirmé la préfecture
qui a également déposé une requête en mai 2013. C'est dire si l'affaire est
prise au sérieux, même si l'on ne peut préjuger du résultat de l'enquête.
Mais l'entreprise Pizzorno qui
étend son quasi monopole dans le Var, n'est pas une inconnue à la préfecture.
Ne serait-ce qu'avec l'affaire toujours pendante de la décharge du
Balençan...voir plus haut. Et quelques autres comme en 2007 en Tunisie, où le
groupe épaulé par un conseiller très influent, ancien ministre de la Défense
et...administrateur de...Pizzorno : François Léotard, avait remporté un
marché qui fit scandale, du temps de Ben Ali. (3) (4)
On se croirait revenu quelques
décennies en arrière, du temps où les marchés publics donnaient lieu à quelques
arrangements pas piqués des vers qui ont ici fait tomber l'homme fort du Var,
Arreckx et coûté la vie à une députée. Sans parler de la parenthèse Le
Chevallier. Aujourd'hui, comme on le voit tous les jours ou presque, avec des
personnalités de haut rang, telles Balkany, Serge Dassault, Cahuzac,
Guérini...la liste serait trop longue. Pendant la crise, les affaires
continuent et les petits arrangements entre amis aussi.
![]() |
l'incinérateur de Lagoubran |
Toulon a besoin d'air pur
La moralisation de la vie
publique marche au pas de celle du capitalisme : tant que l'argent, le
profit pour quelques-uns seront les moteurs de la société, tous les moyens de
posséder seront bons...à condition de ne pas se faire prendre et d'inventer les
astuces qui permettent de créer l'illusion de la légalité. C'est cela qui ruine
la confiance des gens d'en-bas à qui on fait payer les jeux d'argent de ceux
qui en gagnent en spéculant ou en faisant travailler les autres, et encore pas
tous !
Il est grand temps de souffler un
peu d'air frais, dans cette ville littorale décidément très polluée. C'est
l'ambition de la liste présentée par le Front de gauche qui entend mettre de
l'ordre dans la gestion des services publics livrés à l'appétit des
multinaltionales qui, non seulement ne font pas baisser les prix mais en
arrivent à tenir les commandes de nos villes en gérant à leur place mais pour
leur compte à elles, l'argent des contribuables.
Et c'est cette politique là qui
élimine la concurrence des PME, TPE, artisans et commerçants, agriculteurs
familiaux...et crée les conditions d'un chômage massif et des reculs sociaux
qui nous sont imposés. Tout se tient. On ne changera pas de système économique
d'ici les municipales et les Européennes, certes, mais on peut donner, par le
vote, un signal de la prise de conscience
de l'obstacle à franchir en le faisant reculer et en rouvrant la
perspective qu'Hollande a laissée à la porte de l'Elysée.
René Fredon
Plus de 300 000 habitants
|
||||
|
Population
|
Ecart relatif au référentiel de
coûts
|
Coût net/hab
|
|
CU Strasbourg
|
467 376
|
+
|
54%
|
98,00 €
|
Marseille Provence Métropole
|
144 117
|
+
|
33%
|
149,00 €
|
Paris
|
2 215 197
|
+
|
13%
|
144,00 €
|
Bordeaux Métropole
|
702 522
|
+
|
10%
|
104,00 €
|
Grand Lyon
|
1 257 114
|
+
|
9%
|
70,00 €
|
Nantes Métropole
|
580 502
|
+
|
8%
|
98,00 €
|
Grenoble-Alpes-Métropole
|
403 217
|
+
|
7%
|
107,00 €
|
Lille Métropole
|
1 100 000
|
-
|
-9%
|
115,00 €
|
Communauté du Pays d'Aix
|
366 762
|
-
|
-11%
|
99,00 €
|
Rennes Métropole 4
|
412 533
|
-
|
-28%
|
61,00 €
|
De 100 000 à 300 000 habitants
|
||||
CU Pays de Biarritz
|
105 396
|
+
|
35%
|
149,00 €
|
SMICVAL du Libournais
|
186 047
|
+
|
27%
|
114,00 €
|
Saint- Nazaire agglomération
|
116 519
|
+
|
24%
|
116,00 €
|
Communauté urbaine HAVRE
|
246 195
|
+
|
10
|
131,00 €
|
Grand Nancy
|
264 000
|
+
|
10%
|
107,00 €
|
Clermont Communauté
|
279 621
|
+
|
9%
|
87,00 €
|
Caen La Mer
|
222 359
|
+
|
6%
|
94,00 €
|
Reims Métropole
|
215 326
|
+
|
5%
|
86,00 €
|
CA Plaine centrale du Val de Marne
|
151 790
|
-
|
0%
|
94,00 €
|
Agglo Pau Pyrénées
|
150 539
|
-
|
-7%
|
98,00 €
|
Chambéry métropole
|
125 250
|
-
|
15%
|
80,00 €
|
Valenciennes Métropole
|
191 880
|
-
|
19%
|
84,00 €
|
Angers Loire Métropole
|
273 403
|
-
|
23%
|
67,00 €
|
Le Mans Métropole
|
183 220
|
-
|
-27%
|
70,00 €
|
Dunkerque Grand Littoral
|
197 027
|
+
|
30%
|
87,00 €
|
CA du Douaisis
|
157 392
|
-
|
-41%
|
75,00 €
|
Communauté urbaine BREST
|
210 117
|
-
|
45%
|
48,00 €
|
Le Grand Dijon
|
244 243
|
+
|
49%
|
46,00 €
|
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